Plantes indigènes de l’I.-P.-É. à célébrer et à chérir
L’association de la pomme de terre avec l’Ile-du-Prince-Édouard est enracinée dans l’imaginaire canadien, et même canonisée dans la culture par le classique « Bud the Spud » du chanteur folk Stompin’ Tom Connors. Le statut emblématique de ce tubercule est bien mérité, car les sols sablonneux bien drainés (et célèbres pour leur couleur rouge) de l’Ile-du-Prince-Édouard sont parfaits pour sa culture.

Même si elle est cultivée sur environ 15 % du territoire de la province et qu’elle contribue à son économie à hauteur de plus d’un milliard de dollars par an, la pomme de terre (Solanum tuberosum) n’est pas originaire de l’ile de la côte est, mais des Andes, en Amérique du Sud. Ceci dit, la vie végétale de l’Ile-du-Prince-Édouard ne se limite pas aux fermes de pommes de terre.
Située entièrement à l’intérieur de l’écozone maritime de l’Atlantique, la plus petite province du Canada est recouverte à 40 % de forêts, tandis que son littoral de 3 000 kilomètres – constitué de plages sablonneuses, de falaises, d’estuaires et d’autres habitats côtiers – abrite des plantes indigènes résistantes au sel, au vent et aux tempêtes.
La prochaine fois que vous mangerez des pommes de terre rissolées, des frites ou de la purée de pommes de terre de l’Ile-du-Prince-Édouard, pensez aussi aux plantes véritablement indigènes de l’ile.
(Consultez nos blogues sur les plantes indigènes des autres provinces et territoires : Colombie-Britannique, Alberta, Saskatchewan, Manitoba, Ontario, Québec, Nouveau-Brunswick, Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve-et-Labrador, Yukon et Nunavut.)

Sabot de la vierge
Le sabot de la vierge, ou cypripède acaule (Cypripedium acaule), est l’emblème floral de l’Ile-du-Prince-Édouard et figure sur ses armoiries aux côtés de plantes représentant l’Angleterre (la rose), l’Irlande (le trèfle), l’Écosse (le chardon) et, bien sûr, les fleurs de pomme de terre.
Comptant parmi les nombreuses orchidées indigènes de l’ile, cette plante possède deux feuilles à la base d’une mince tige et une fleur unique qui fleurit en mai et juin. La partie de la fleur en forme de pochette, appelée le labelle, varie du rose pâle au rose foncé, et est souvent striée de veines encore plus foncées.
Traditionnellement, les Mi’kmaq préparaient un thé médicinal à partir des racines de cette plante pour traiter l’anxiété et la tuberculose.

Astuces de culture
Cette orchidée fragile à croissance lente est plus facile à admirer dans la nature que dans les jardins domestiques. Pour germer, les graines dépendent d’un champignon particulier du sol dont les filaments, en s’ouvrant, fournissent à la plante les nutriments dont elle a besoin pour se développer. Donc, la germination ne peut se produire n’importe où. De plus, les plantes matures survivent rarement à la transplantation.
Il est préférable de ne pas cueillir ces fleurs dans la nature puisqu’elles mettent longtemps à se régénérer, peuvent irriter la peau et se fanent rapidement. Toutefois, une plante peut vivre plus de 20 ans quand elle n’est pas perturbée.
Au Canada, on trouve le sabot de la vierge dans les terrains boisés et les milieux humides bien drainés, ombragés ou partiellement ombragés, dans toutes les provinces, à l’exception de la Colombie-Britannique, mais il est plus répandu à l’est du Manitoba.
Bienfaits pour les espèces
Si le sabot de la vierge entretient une relation mutuellement bénéfique avec les champignons du sol, il n’est pas très utile aux autres espèces. La fleur est pollinisée par les bourdons qu’elle attire par sa couleur et son parfum, mais il s’agit en fait d’une « publicité trompeuse », car elle ne produit pas le nectar qu’ils recherchent. Une fois le bourdon entré dans la fleur, sa structure fait en sorte qu’il doive entrer en contact avec les parties mâle et femelle de la fleur avant de ressortir, pollinisant ainsi la plante.
Chêne rouge

Le chêne rouge (Quercus rubra), arbre emblématique de l’Ile-du-Prince-Édouard, fait partie des nombreuses espèces d’arbres à feuilles caduques et de conifères caractéristiques de la forêt Wabanaki (acadienne), qui recouvre les provinces maritimes ainsi qu’une partie du Québec et de la Nouvelle-Angleterre. À l’Ile-du-Prince-Édouard, la plupart de ces forêts ont été défrichées il y a des centaines d’années pour la construction navale, l’agriculture et la colonisation, mais il reste des vestiges de forêts matures, comme l’aire naturelle de Royalty Oaks à Charlottetown.
Le chêne rouge peut atteindre une hauteur de plus de 30 mètres et un diamètre de plus de 120 centimètres, et vivre jusqu’à 150 ans. Son écorce est grise et rainurée, et ses feuilles vertes comptent de sept à neuf lobes pointus (segments qui dépassent du contour). Au printemps, des chatons (inflorescence en épi formé de très petites fleurs) pendent des branches comme de petits pompons jaune-vert. À l’automne, les feuilles prennent des teintes magnifiques de rouge, de jaune, d’orange et de brun, et l’arbre produit des glands ronds.
Les Mi’kmaq utilisaient traditionnellement les racines et l’écorce du chêne rouge pour traiter les problèmes digestifs, et le bois est prisé depuis longtemps pour la fabrication de meubles et l’ébénisterie. Les noix de galle (structures bulbeuses qui poussent sur les feuilles et les branches et abritent des larves d’insectes et d’autres organismes) étaient mélangées à du fer pour fabriquer de l’encre noire du 4e au 20e siècle.
Astuces de culture
Cette espèce à croissance rapide s’avère un excellent arbre d’ombrage. Il est couramment utilisé dans les projets d’aménagement paysager et de restauration d’écosystèmes. Préférant les sites bien drainés et ensoleillés, le chêne rouge peut tolérer une variété de conditions du sol ainsi que le sel, y compris le sel de voirie. Il ne pousse habituellement pas très bien dans les endroits venteux ou détrempés ni à proximité d’autres arbres.
Essayez de faire pousser un chêne rouge à partir de glands : conservez-les dans de la vermiculite humide dans un sac scellé au réfrigérateur pendant 42 jours avant de les planter à l’automne, puis recouvrez-les de terre ou de litière de feuilles et laissez-les germer pendant l’hiver.

Au Canada, le chêne rouge est indigène dans toutes les provinces maritimes, en Ontario et au Québec.
Bienfaits pour les espèces
Le chêne rouge fournit un habitat à divers oiseaux, dont le pic, le geai bleu, le tétras et le dindon sauvage. Les cerfs, les écureuils, les ours noirs et les oiseaux mangent les glands et les répandent sur le territoire, contribuant ainsi à la dispersion de l’espèce.
Les lapins et les souris grignotent les jeunes arbres et les nouvelles pousses, tandis que les chenilles des papillons de nuit, dont l’envahissante spongieuse mangent les feuilles, parfois même au point de dépouiller l’arbre et de nuire à sa croissance.
Ammophile à ligule courte
En apercevant des ammophiles à ligule courte (Calamagrostis breviligulata), les amateur·trice·s de télévision et de cinéma du Canada peuvent difficilement s’empêcher de s’imaginer Anne de la maison aux pignons verts qui gambade tout près, coiffée de son chapeau de paille. Les dunes ondulantes ornées de colonies d’ammophiles balayées par le vent sont un symbole du bord de mer de l’Ile-du-Prince-Édouard.
Cette plante vert et or d’une beauté subtile peut atteindre plus d’un mètre de haut avec ses épillets (grappes de fleurs) étroitement regroupés qui forment un long épi au sommet de la tige.

L’ammophile à ligule courte joue un rôle essentiel dans les écosystèmes de dunes qui sont constitués de formations sablonneuses le long des plages, où poussent des plantes et vivent des animaux et d’autres organismes. Le vaste système racinaire de cette graminée est ce qui stabilise les dunes, en les empêchant d’être balayées par le vent ou emportées par la mer, tout en permettant à d’autres plantes de s’établir progressivement. En contrôlant l’érosion, cette plante contribue à atténuer les répercussions de l’élévation du niveau de la mer et des conditions météorologiques extrêmes le long des côtes de l’Ile-du-Prince-Édouard.
Astuces de culture
L’ammophile à ligule courte est souvent utilisée dans des projets de restauration des dunes. On recommande de la planter à l’automne, en plaçant les racines à au moins 25 centimètres sous la surface du sable et en espaçant les bouquets de 15 centimètres si le site présente un risque élevé d’érosion (et à intervalle plus grand si le potentiel d’érosion est faible). À mesure qu’elle s’établit, la graminée se propage par ses tiges souterraines appelées rhizomes. Pour que la restauration des dunes réussisse, il est important d’éviter de marcher ou de rouler en VTT sur les plantes.
L’ammophile à ligule courte préfère les sites côtiers sablonneux, ensoleillés, secs et bien drainés. Au Canada, elle est indigène en Ontario, au Québec et dans les provinces atlantiques.
Bienfaits pour les espèces
L’ammophile à ligule courte et l’écosystème de dunes dans son ensemble fournissent de la nourriture ou un abri à divers oiseaux, comme le pluvier siffleur, le bruant des prés, l’alouette hausse-col et le harle huppé nicheur; à des mammifères, comme la souris sauteuse des champs et le renard roux; et aux insectes, comme la cicadelle,de petits insectes sauteurs qui se nourrissent du jus des plantes.