RPVC 2025 : « Le territoire possède la réponse » Ellen Firth, Gwich’in Tribal Council

Notre Rapport Planète vivante Canada (RPVC) 2025 a utilisé 5 099 inventaires de populations pour 910 espèces afin de faire le suivi de la perte d’espèces au fil du temps. Mais l’état de santé des écosystèmes ne peut être pleinement capté par un seul système de savoir. Le RPVC 2025 inclut donc des perspectives autochtones de tout le pays.

Ellen Firth, membre du Gwich’in Tribal Council.
Ellen Firth, membre du Gwich’in Tribal Council.

Ellen Firth, membre du Gwich’in Tribal Council, vient d’une grande famille d’Inuvik, dans le coin nord-ouest des Territoires du Nord-Ouest, un territoire où elle a grandi jusqu’à ses neuf ans, quand on l’a forcée à aller au pensionnat au village.

Avec un pied-à-terre en ville, elle passe maintenant autant de temps qu’elle le peut avec sa famille à leur cabine située sur le territoire. Elle espère sensibiliser les jeunes de la communauté gwich’in à l’importance de respecter ces terres qui les entourent.

Voici ce que nous a confié Ellen à propos des changements qu’elle remarque sur le territoire des Gwich’in :

Quand nous allons pêcher en juin et juillet, la température est de plus en plus chaude. Un jour, il faisait 34 degrés, et j’étais là à vider les poissons dans la chaleur. C’était insupportable! La quantité de poissons a aussi diminué. Auparavant, on pouvait attraper jusqu’à 70 poissons avec un seul filet, et maintenant, on doit utiliser trois filets. Une journée, on n’a pris que quatre poissons.

Cette année, le niveau de l’eau est très bas, ce qui crée des barres de sable et fait augmenter la température de l’eau. Nous avons aussi remarqué que de nombreux castors avaient construit des barrages dans tous les ruisseaux, empêchant ainsi l’eau de s’écouler. Il faudrait offrir une prime pour ces castors afin de limiter leur population, comme on l’a fait, il y a quelques années : 100 $ par castor.

Le mouvement des espèces change également. Pendant deux années consécutives, près de Tuktoyaktuk, les baleines se sont aventurées jusque dans le delta, où l’eau est boueuse et peu profonde. Il y a quelques années, , mais on aurait dit plutôt qu’elles étaient une centaine. La même situation s’est produite cette année.

En fait, quand les mâles et les femelles sont tués, les petits sont désorientés et ne savent plus où aller. Ils viennent donc dans le delta et leurs poumons s’en retrouvent affectés.

Illustration montrant des barrages de castors et des poissons.
Illustration de Shawna Kiesman

Vous savez ce qui me fait peur? Quand des chasseur.euse.s rapportent une baleine à Aklavik, qu’il.elle.s la découpent en morceaux et qu’il.elle.s découvrent que la viande n’est pas comestible. Il faut toujours examiner le foie et le cœur : s’il y a des taches, on donne tout aux chiens.

Je pense que le réchauffement climatique et les changements infrastructurels ont un impact sur les espèces et leurs habitats, poussant les animaux à migrer vers le nord et modifiant leur comportement.

Le fait d’habiter le territoire et d’apprendre le mode de vie traditionnel peut aider à le garder en santé.

Habituellement, nous allons à notre cabine en mai, revenons en ville au mois de juin, et pêchons de juin jusqu’à la fin septembre environ. Moi, je pêche beaucoup. J’ai élevé plusieurs de mes enfants sur le territoire, et j’ai maintenant quatorze petits-enfants, dont quatre sont âgés de 8 ans, et deux pratiquent toutes les activités traditionnelles.

Au fil des ans, j’ai passé beaucoup de temps à notre cabine. La vie y est belle. Si on pouvait faire les choses à notre façon, on habiterait le territoire à l’année. Mais comme mes petits-enfants vont à l’école, ce n’est pas possible.

J’aimerais m’impliquer dans une école d’Aklavik pour enseigner aux enfants la valeur de la vie sur le territoire. Quand ma petite-fille en parle en classe, les élèves sont intéressé.e.s et lui posent beaucoup de questions. Il.elle.s ne savent pas que nous avons tout ce qu’il faut là-bas : la télé, les motoneiges. Mais c’est le territoire qui possède la réponse, et c’est ce que j’aimerais transmettre aux enfants, de la garderie à la dernière année du secondaire, si on m’en donne la possibilité. Je pense que ça changerait beaucoup de choses.

Notre Rapport Planète vivante Canada 2025 révèle le déclin moyen le plus sévère des populations d’espèces à ce jour. Découvrez ce qui se passe dans les habitats à travers le pays et la façon dont nous pouvons freiner et renverser la perte d’espèces avant qu’il ne soit trop tard.