Megan Leslie à propos de renverser « l’irréversible »
Les vagues de chaleur meurtrières, les feux de forêt, le déclin des espèces et les super-tempêtes sont devenus la norme d’une planète en crise, et les dix prochaines années sont cruciales. Si nous ne rétablissons pas notre rapport avec la nature, nous tomberons dans un engrenage irréversible entrainant la destruction d’écosystèmes, de graves perturbations climatiques et la disparition de plus d’un million d’espèces dans le monde.
Mais l’avenir de la planète n’est pas encore joué. Nous pouvons encore éviter que la perte de biodiversité et les dérèglements climatiques atteignent des niveaux catastrophiques si nous agissons maintenant et si nous utilisons l’un des outils les plus efficaces qui soient : la nature.
Nous nous sommes entretenu.e.s avec Megan Leslie, présidente-directrice générale de WWF-Canada, pour discuter de Régénérer le Canada, notre nouvelle stratégie de conservation visant à renverser ce qui semblait auparavant « irréversible ».
Que signifie Régénérer le Canada?
La planète est confrontée à deux crises : les dérèglements climatiques et la perte de biodiversité, c’est-à-dire la disparition de la nature et des espèces. Régénérer le Canada est notre plan sur 10 ans visant à renverser la perte d’espèces et restaurer la nature tout en luttant contre les dérèglements climatiques.
Les espèces connaissent un déclin parce qu’elles manquent d’habitats. Elles perdent les endroits où elles trouvent de la nourriture et de l’eau, où elles mettent bas et élèvent leurs petits, où elles se reposent pendant la migration et où elles hibernent.
Pour renverser le déclin des espèces, nous devons renverser le déclin de la nature. C’est pourquoi le WWF-Canada travaille à restaurer au moins un million d’hectares d’habitats dégradés, et à protéger et assurer l’intendance d’au moins 100 millions d’hectares d’écosystèmes écologiquement riches.
Et ce qui est incroyable, c’est que ces écosystèmes stockent également du carbone. Donc, en protégeant, en gérant et en restaurant la nature, nous réduirons aussi la quantité de carbone dans l’atmosphère de 30 millions de tonnes.
En nous appuyant sur les analyses scientifiques et les recommandations des Autochtones, nous concentrerons tous nos efforts de conservation sur l’atteinte de ces trois objectifs afin de remettre notre avenir sur la bonne voie.
Pourquoi avons-nous besoin d’un plan sur 10 ans?
La prochaine décennie est cruciale. Nous avons tou.te.s lu les grands titres terrifiants qui confirment ce que disent les scientifiques internationaux : les dérèglements climatiques sont parmi nous, la perte de biodiversité est en cours, et si nous ne traçons pas la voie au rétablissement de la nature, nous continuerons sur une voie irréversible.
La première réponse à cette question, c’est que nous devons agir maintenant si nous voulons renverser la tendance. Le deuxième, c’est que les efforts de conservation ne donnent pas de résultats du jour au lendemain. Il faut parfois des années pour en voir l’impact.
Le problème avec une planification à court terme, c’est que l’arbre risque de cacher la forêt. En établissant un plan ambitieux sur 10 ans avec des étapes sur trois ans, nous pouvons développer une vision d’ensemble qui nous permet d’agir à grande échelle! C’est audacieux, mais c’est ce que nous devons faire pour réussir.
Comment le travail du WWF-Canada évolue-t-il?
Nous continuons de nous concentrer sur le rétablissement des espèces — après tout, elles font partie de notre ADN. Nous poursuivons ce travail en protégeant et en restaurant les habitats des espèces en déclin. Ce qui change, c’est que maintenant, nous voulons en plus que chacune de nos actions profite à la fois aux espèces et au climat. Nous avons pris cette tangente parce que c’est nécessaire — la science a prouvé que les deux crises s’alimentent l’une et l’autre — et parce qu’il est plus efficace de s’attaquer à plusieurs enjeux à la fois.
Pourquoi la conservation menée par les Autochtones et les savoirs autochtones occupent-ils une place si importante dans le plan?
La conservation et les droits des Autochtones sont inextricablement liés. J’ai récemment eu le privilège d’entendre le grand chef Jonathan Solomon parler de l’importance des espèces sur le territoire des Cris Omushkego. Il expliquait que s’ils perdent les espèces, ils perdent aussi leur mode de vie et leur langue. Les mots disparaissent. La culture disparaît.
La conservation menée par les Autochtones est non seulement l’approche la plus équitable, mais c’est aussi l’une des plus efficaces. Des études montrent que les aires protégées et de conservation autochtones présentent une plus grande biodiversité que d’autres aires protégées.
Nous sommes fier.ère.s de soutenir les communautés, les gouvernements et les organisations autochtones dans leur incroyable travail de conservation qui va de la protection des épaulards contre les collisions avec les navires à la restauration de l’habitat du saumon, en passant par la sauvegarde des réserves de carbone contre le développement industriel et la restauration des forêts endommagées par les feux, et la protection et l’intendance des écosystèmes terrestres et marins.
Que souhaites-tu que les gens retiennent le plus?
Qu’il n’est pas trop tard! Si nous agissons maintenant — avec ambition, dévouement et collaboration — nous pouvons, ensemble, renverser le cours des choses.
Que peuvent faire les gens pour aider?
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