La COP16 s’engage en faveur des peuples autochtones, mais s’effondre sur le financement de la nature
Par Tina Knezevic et Joshua Ostroff
Deux semaines de négociations intenses lors du sommet sur la biodiversité de la COP16 qui s’est tenu en octobre à Cali, en Colombie, ont permis de donner aux peuples autochtones une place permanente à la table des négociations de l’ONU. Cependant, elles ont été caractérisées par l’échec frustrant d’une absence d’accord sur le financement de la conservation pour les pays en développement.
Le débat sur le financement s’est prolongé au-delà du 1er novembre, date prévue pour la clôture de la COP, jusqu’au lendemain matin; puis plusieurs négociateur.rice.s ont pris leur vol de retour, ce qui a entrainé la suspension du sommet.
L’objectif de la rencontre de cette année était de démontrer comment la communauté internationale prévoyait de mettre en œuvre le Cadre mondial de la biodiversité (CMB) signé à Montréal à la COP15 en 2022, pour freiner et renverser la perte de biodiversité d’ici 2030.
Chaque pays s’était engagé à préparer une stratégie et un plan d’action nationaux pour la biodiversité (SPANB), soit une feuille de route pour atteindre les 23 objectifs du CMB, qui comprennent la protection et la restauration d’un tiers des terres et des eaux de la planète. Mais au moment du coup d’envoi de la COP16, le 21 octobre, il n’y avait que 34 propositions, dont celle du Canada, sur 196 pays.
Un autre objectif était de résoudre certaines questions en suspens qui avaient été reportées lors des négociations de Montréal, notamment le financement de la protection de la nature et les droits des peuples autochtones.
La bonne nouvelle : une victoire pour les peuples autochtones du monde entier
Au cours de la dernière semaine de la conférence, nous avons organisé une table ronde sur la façon dont les communautés autochtones au Canada mettent en œuvre le CMB par la restauration et la gestion de leurs territoires traditionnels.
« Lors de ces négociations, on parle beaucoup de ce qu’on “pourrait” et “devrait” faire, a déclaré Megan Leslie, présidente-directrice générale du WWF-Canada, en guise d’introduction à l’évènement. Aujourd’hui, nous allons mettre l’accent sur ce qu’on “peut” faire et ce qu’on “fait”. Les objectifs de restauration du CMB sont atteignables – nous le savons grâce au travail que nos partenaires accomplissent sur le terrain. »
Quelques jours plus tard, la COP16 a agi et adopté l’article 8(j). Cette décision historique crée un organe subsidiaire permanent de la Convention sur la diversité biologique – soutenu par le droit international et dirigé par un groupe autochtone – qui appliquera le savoir traditionnel, les innovations et les pratiques à la conservation et à l’utilisation durable de la biodiversité.
La mauvaise nouvelle : Pas d’accord sur le financement de la conservation de la nature
L’approbation spectaculaire du Cadre mondial de la biodiversité par la COP15 au petit matin s’est alors accompagnée de la promesse que les pays contribueraient à hauteur de 200 milliards de dollars par an d’ici 2030, provenant de sources publiques et privées, et qu’ils distribueraient 20 milliards de dollars d’ici à l’année prochaine.
Mais jusqu’à présent, le Fonds-cadre mondial pour la biodiversité (FCMB) n’a recueilli que 407 millions de dollars, dont près de la moitié provient du Canada, sans compter les 2 millions de dollars du gouvernement du Québec annoncés à la COP16, faisant de la belle province le premier gouvernement infranational à y contribuer. De nombreux pays en développement ont également fait pression pour créer un nouveau fonds de distribution qui serait moins lourd et moins contrôlé par les pays riches.
Le point positif est qu’au lieu d’attendre la COP17 en 2026, la COP16 reprendra en février 2025 pour décider de la manière de collecter et de distribuer l’argent plus efficacement.
Contrairement à la fin triomphale de la COP15, l’échec de cette année a laissé de sérieuses questions sur la manière dont le monde paiera pour protéger la nature, ainsi qu’un manque déconcertant d’urgence pour mettre fin à la perte de la nature et ramener les espèces menacées à des populations viables.
Bien entendu, cela ne fait qu’accroitre l’urgence de nos propres efforts, comme l’initiative Mission restauration que nous avons fièrement lancée lors de la COP16.