Des milliards de litres de rejets issus des navires sont déversés dans les aires marines protégées chaque année
Vous pouvez aider à faire cesser les déversements dans les aires marines protégées (AMP). Faites-vous entendre maintenant.
Il n’est pas étonnant que le déversement de rejets issus des navires soit une menace pour les espèces marines, mais nous n’en connaissions pas l’ampleur. Jusqu’à maintenant.
L’Évaluation des déversements issus des navires du WWF-Canada révèle pour la première fois la quantité de rejets produite — et potentiellement déversée sur place — par les bateaux lorsqu’ils naviguent en eaux canadiennes.
Nous avons constaté que les bateaux génèrent 147 milliards de litres d’eaux grises, d’eaux de lavage des épurateurs, d’eaux usées et d’eaux de cale dans les eaux canadiennes chaque année. C’est environ le même volume que 59 000 piscines olympiques!
Ces rejets — qui sont créés par les systèmes d’épuration des gaz d’échappement, les douches, les toilettes, les cuisines et les autres « activités de routine » — sont nuisibles, et même toxiques, pour les espèces.
Les résultats alarmants de notre étude soulèvent des questions importantes à propos de la façon dont le gouvernement s’assurera que ces rejets dangereux n’aboutissent pas dans les aires protégées, dont la raison d’être est de protéger les écosystèmes marins vulnérables et les espèces en voie de disparition.
Quelle quantité de rejets sont déversés dans les aires protégées?
Environ 10 % des rejets issus des navires sont générés dans les aires protégées qui offrent un refuge aux baleines, aux oiseaux de mer, aux poissons, aux coraux, aux crustacés et autres espèces.
Par type de rejets, cela fait 14,5 milliards de litres d’eaux de lavage des épurateurs, 233 millions de litres d’eaux grises, 34,6 millions de litres d’eaux usées et 5,2 millions de litres d’eaux de cale.
Bien que seulement un bateau sur huit dans notre analyse soit équipé d’épurateurs, les eaux de lavage des épurateurs forment, et de loin, le rejet le plus fréquent. La plupart des navires avec des épurateurs utilisent des systèmes ouverts qui puisent de l’eau de mer et la rejettent en continu, transformée en effluent chaud, acide et hautement contaminé par des métaux lourds et des agents cancérigènes. Nous pouvons affirmer en toute confiance que presque tous ces rejets toxiques sont déversés là où ils sont créés, y compris dans les aires protégées. Les eaux de lavage des épurateurs accentuent aussi l’acidification de l’océan et réduisent sa capacité à absorber le carbone.
Si les eaux grises, les eaux usées et les eaux de cale peuvent être retenues pour en disposer sécuritairement dans les installations portuaires, il n’est pas possible de confirmer quelle quantité est réellement retenue et quelle quantité est déversée dans les aires protégées.
Quelles aires protégées sont les plus affectées par les déversements?
En 2019, 5546 bateaux — des cargos, des navires citernes, des remorqueurs, des navires de pêche, des traversiers, des yachts et des navires de croisière — ont navigué 32 269 843 kilomètres à travers les aires marines protégées du Canada.
Les aires protégées situées près des principaux ports du Canada, et le long des routes maritimes des navires marchands et de passager.ère.s, sont les plus affectées par les déversements.
Cela inclut la réserve nationale de faune en milieu marin des îles Scott en Colombie-Britannique, créée en 2018 pour protéger des millions d’oiseaux marins qui viennent s’alimenter et se reproduire sur les falaises et les roqueries (habitat de reproduction) des otaries de Steller. Il y a aussi le parc marin du Saguenay-Saint-Laurent qui abrite une population de bélugas en voie de disparition. Puis il y a la zone de protection marine du banc de Saint-Anne, à l’est de l’ile du Cap-Breton, un refuge pour les tortues luth en voie de disparition et les loups atlantiques.
La figure ci-dessous montre les 20 AMP les plus affectées, classées selon la quantité totale de rejets qui y est produite annuellement.
Protégées en théorie seulement?
Le Canada a protégé 13,8 % de ses océans et littoraux, et s’est engagé à atteindre 30 % d’ici 2030. Pourtant, les espèces en péril sont toujours menacées par les rejets nocifs des navires, même dans les aires protégées.
En 2019, le Canada s’est engagé à mettre en place des normes minimales pour les AMP fédérales afin d’interdire les activités minières, le développement pétrolier et gazier, le chalutage de fond et le déversement. Nous sommes maintenant presque trois ans plus tard et ces normes restent toujours à définir — et elles ne s’appliqueront qu’aux nouvelles AMP. Même une interdiction clairement définie des déversements ne s’appliquera pas aux AMP fédérales préexistantes, aux AMP provinciales et territoriales et aux autres aires marines protégées.
L’ampleur des rejets déversés dans les AMP révélée par notre Évaluation nationale des déversements issus des navires explique clairement pourquoi une définition détaillée du déversement qui interdise aux bateaux de déverser tout rejet des activités de routine dans les AMP est demandée d’urgence. Notre rapport recommande aussi que ces normes minimales s’appliquent à toutes les zones incluses dans les cibles de conservation marine du pays.
Les efforts de conservation du Canada ne devraient pas être mesurés par la taille des lieux protégés, mais par la rigueur de leurs protections.
Le gouvernement ne devrait pas dire d’une zone qu’elle est protégée si des déversements y sont permis. Envoyez un message fort au gouvernement et dites que l’interdiction de déversement doit inclure TOUS les rejets.
Faites-vous entendre!
Vous pouvez lire la synthèse de l’Évaluation des déversements issus des navires ainsi que le rapport technique complet (en anglais seulement) pour en savoir plus sur la façon dont vous pouvez aider à faire cesser les déversements dans les aires marine protégées du Canada.