Nos océans ne peuvent attendre un Rio+40

Daniela Diz, conseillère, spécialiste en approches de conservation, WWF-Canada
Les choses allaient mieux il y a 20 ans. Au Sommet de la Terre de 1992, le Canada passait encore pour un pays progressiste, et il s’engageait fermement envers l’environnement en adhérant au principe du développement durable selon lequel « la protection de l’environnement doit faire partie intégrante du processus de développement et ne peut être considérée isolément» (Déclaration de Rio, Principe 4).
Malheureusement, on ne peut plus en dire autant aujourd’hui.

(C) Peter Green
Les océans figurent parmi les grands sujets abordés cette semaine dans le cadre de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable, ou Rio+20. Cette conférence est une occasion extraordinaire de démarrer un processus de négociation concret en vue d’arriver à un nouvel accord  de mise en œuvre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS), un élément clé pour la conservation et l’usage responsable de la biodiversité marine dans les zones extraterritoriales nationales. Ces zones internationales couvrent environ 70 % des océans dans le monde et l’on y observe qu’en raison de la pression croissante de l’activité humaine, les composantes de la biodiversité et la santé des écosystèmes déclinent rapidement. Nous les humains sommes tributaires de la santé de ces écosystèmes et de tout ce qui compose leur biodiversité. C’est notre survie qui en dépend.
La plupart des nations dans le monde, y compris le G77 et la Chine, ainsi que l’Union européenne, sont favorables à une négociation fructueuse en vue de cet accord de mise en œuvre. Cependant, le Canada compte parmi les quelques pays – avec les États-Unis, la Russie et le Japon – qui s’opposent à ce qu’un tel accord soit conclu à Rio cette semaine. Or cet accord servirait à combler les vides et le fractionnement juridiques qui demeurent en ce qui touche au régime actuel de gouvernance des océans dans les eaux extraterritoriales nationales, ce qui fait obstacle à la mise en œuvre efficiente des mesures locales ayant fait l’objet d’ententes il y a 20 ans ou plus – zones marines protégées en haute mer et études d’impacts sur l’environnement, entre autres. L’accord de mise en œuvre couvrirait également des questions qui demeurent non résolues en ce qui a trait au partage de l’accès et des bénéfices des ressources génétiques marines dans ces zones, question intrinsèquement liée au développement durable.
Le Fonds mondial pour la nature est un membre de la High Seas Alliance, une coalition de 28 organismes représentant la société civile mondiale. L’Alliance appuie vigoureusement les « efforts réalisés en vue de combler les vides juridiques et d’assurer une meilleure gestion des océans afin de disposer d’un cadre juridique plus intégré, plus équitable et juste. Si l’on ne crée pas le cadre juridique nécessaire pour assurer la protection efficiente des zones marines extraterritoriales nationales, les océans – sans lesquels il ne peut y avoir pas de vie sur la Terre – continueront de se dégrader tandis que se poursuivra leur surexploitation, et que sera menacée leur capacité de fournir les écoservices essentiels à la survie de notre génération et de celles qui nous suivront. »
Selon la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, les états membres – dont fait partie le Canada – ont encore l’obligation de coopérer en matière de conservation des ressources vivantes en haute mer, ainsi que de protection et de préservation de l’environnement marin.  Le monde entier appelle à la négociation de cet accord de mise en œuvre, et le Canada devrait à tout le moins respecter son obligation de coopérer en vertu d’une loi internationale, et faire preuve de solidarité… après tout, il s’agit de notre patrimoine naturel à tous.
Et la planète ne peut pas attendre un  Rio+40.
Pour plus d’information et des infos en direct de Rio, rendez-vous au https://www.oceansinc.org/