Plus assez d’espace pour vivre : aidez-nous à protéger l’habitat des grands félins

Durant mon enfance au Népal, j’ai entendu plusieurs histoires sur les puissants tigres qui régnaient sur les forêts de notre pays et sur l’insaisissable léopard des neiges qui rôdait là-haut, dans les montagnes de l’Himalaya. Ces contes remplissaient mon jeune esprit d’émerveillement. J’étais tellement fasciné par la majesté du tigre et du léopard des neiges que j’ai dédié ma vie à leur étude.

Au cours des années, j’ai suivi les tigres et les léopards des neiges à travers l’Asie. Ce qui m’a toujours impressionné, c’est à quel point ils sont parfaitement adaptés à leur environnement. La longue queue, l’épaisse fourrure, les pattes comme des raquettes, les grandes narines, les membres robustes et les oreilles courtes des léopards des neiges jouent un rôle spécifique pour qu’il puisse survivre dans l’une des régions les plus inhospitalières du monde. Les rayures du tigre et sa capacité à se dissimuler et à embusquer ses proies en font l’ultime prédateur partout où il passe.

Mais même leur force physique et leurs avantages issus de l’évolution ne peuvent rien contre une menace comme la perte d’habitat.

Ils ne sont plus maîtres de leur domaine

Les grands félins et les humains cohabitent depuis des millénaires, mais cette existence n’a pas toujours été harmonieuse. Tant les tigres que les léopards des neiges voient leurs domaines se rétrécir, alors que la concurrence avec les humains pour l’espace s’intensifie.

Il y a un peu plus d’un siècle, environ 100 000 tigres vivaient librement en Asie. À cause d’un mélange de persécution, de perte d’habitat et du déclin des espèces-proies, il n’y a plus que 3900 tigres qui survivent dans moins de 5 % de leur aire de répartition historique.

Environ 40 % des forêts et des habitats naturels où vivaient les tigres ont disparu au cours de la dernière décennie, laissant les populations fragmentées et isolées.

snow leopard
Snow leopard © naturepl.com / Reinhard / ARCO / WWF

On croit qu’il y a environ entre 2700 et 3400 léopards de neiges adultes en liberté, mais il y a tellement de choses que nous ne savons pas à leur sujet. À ce jour, seulement 3 % de leur aire de répartition a été étudiée systématiquement, ce qui pose un défi aux expert.e.s de la conservation comme moi. Le développement de routes, des changements dans les pratiques traditionnelles de transhumance des troupeaux, le développement minier et la fondation de nouvelles communautés fragmentent l’habitat dont le léopard des neiges a besoin pour chasser et se reproduire.

L’empiétement des humains met aussi les grands félins à risque de chasse de représailles – malheureusement, un léopard des neiges est tué chaque jour.

Quand le tigre part à la rencontre du léopard des neiges

Récemment, on a trouvé des tigres qui parcouraient les hautes montagnes du Bhoutan, de l’Inde et du Népal. L’an dernier, les tigres du Népal ont franchi deux fois leurs records d’altitude : les pièges photographiques ont capté leur image à 3165 mètres! Au Bhoutan, on les a vus au-dessus de 4200 mètres d’altitude, partageant de ce fait l’aire de répartition du léopard des neiges.

Ce constat pourrait indiquer que la crise climatique et les perturbations humaines dans les basses-terres poussent les tigres plus au nord. Un changement qui pourrait mener à une concurrence avec les léopards des neiges et à plus de conflits avec les communautés.

Bien que typiquement associés à la jungle, les tigres s’adaptent facilement à un large éventail d’habitats – des forêts tropicales aux milieux humides, en passant par les montagnes enneigées et les prairies. Il est aussi possible que les tigres aient autrefois vécu dans les montagnes et qu’ils y retournent maintenant que leurs populations croissent au même moment où les habitats des basses-terres se rétrécissent. Les biologistes scrutent activement cette possibilité, ainsi que les impacts des dérèglements du climat.

Surtout, cela souligne l’importance de protéger et de restaurer les divers habitats et corridors écologiques qui les connectent pour que les espèces puissent se déplacer sécuritairement de l’un à l’autre.

Camera trap photograph of tiger (Panthera tigris) in Bhutan.

Camera trap photograph of tiger in Bhutan © DOFPS, Bhutan.

Longue vie aux léopards!

C’est justement quelque chose que mon équipe et moi accomplissons au Népal grâce à l’appui des donateur.rice.s canadien.ne.s. En utilisant de l’équipement de pointe, comme des colliers GPS et des pièges photographiques, nous identifions les habitats essentiels dont les grands félins ont désespérément besoin en ce moment et à l’avenir, pour répondre à la crise climatique et aux perturbations humaines.

Les grands félins sont des reproducteurs prolifiques – ils peuvent avoir jusqu’à cinq petits par portée – mais ils ont besoin de grands territoires et de nombreuses proies pour voir leurs populations se rétablir. Je sais que nous pouvons sauver les grands félins d’Asie pour toujours si nous nous assurons simplement qu’ils aient suffisamment d’espace pour se déplacer et de nourriture pour s’alimenter.

J’espère que vous vous joindrez à moi pour créer un avenir brillant pour les grands félins majestueux, afin que les histoires qui m’ont inspiré enfant continuent de parler d’espèces vivantes, et non des fantômes du passé.