Les outils juridiques existants sont insuffisants pour protéger les écosystèmes marins du Canada contre le bruit sous-marin, dit le WWF-Canada
Une analyse juridique met en lumière les lacunes actuelles et fournit des recommandations pour renforcer la politique nationale
Toronto, 10 juin 2024 – Les outils juridiques dont dispose le Canada pour s’attaquer au bruit sous-marin ne sont pas efficaces. Certaines parties de l’océan étant déjà 100 fois plus bruyantes qu’elles ne le seraient à l’état naturel, le gouvernement fédéral doit accélérer le pas pour créer une stratégie globale afin de protéger les espèces et les écosystèmes marins.
Il s’agit de la conclusion d’un nouveau rapport, La stratégie sur le bruit dans les océans du Canada : une analyse des lois et des politiques, préparé pour le Fonds mondial pour la nature (WWF-Canada) par East Coast Environmental Law et West Coast Environmental Law.
La navigation commerciale connaissait déjà une expansion, avant même que l’oléoduc Trans Mountain ne commence à remplir des pétroliers dans la mer des Salish, en Colombie-Britannique, le mois dernier. Le terminal de gaz naturel liquéfié de LNG Canada à Kitimat permettra aux pétroliers de traverser la zone marine du Grand Ours d’ici le milieu de l’année 2025, et un terminal d’exportation de gaz propane de 1,3 milliard de dollars sera complété à Prince Rupert d’ici 2026. Entre-temps, les dérèglements climatiques ouvriront bientôt de nouvelles routes commerciales maritimes à travers l’océan Arctique, encore calme.
Le bruit dans les océans n’est pas explicitement incorporé aux lois et règlements existants relatifs à la conservation marine, ni aux lois régissant les industries qui opèrent dans l’océan. Ainsi, cette analyse juridique a examiné les lois et politiques de la Couronne fédérale en matière de gestion des océans, afin d’identifier les mécanismes que le Canada peut utiliser, ou renforcer, pour s’attaquer à cette menace grandissante à la vie marine.
Elle conclue que les outils dont le Canada dispose déjà pour protéger les environnements sonores sous-marins – par des aires marines protégées (AMP), des lignes directrices sur la qualité du milieu marin (QMM) ou en vertu de la Loi sur les océans, de la Loi sur les pêches, de la Loi sur la marine marchande du Canada et la Loi sur les espèces en péril – sont sous-utilisés et ne disposent pas de cibles claires et d’éléments importants qui auraient pour effet de rendre ces mesures de protection juridiquement contraignantes, mesurables et applicables.
L’analyse juridique recommande également différentes voies de passage pour que Pêches et Océans Canada, Transports Canada, Environnement et Changement climatique Canada, Parcs Canada et les organismes de règlementation des industries pétrolières en haute mer puissent travailler en collaboration dans le but de s’attaquer en priorité au bruit sous-marin, dont :
- la fixation de normes régionales et sous-régionales qui imposent des seuils de bruit;
- la mise en place de mesures concrètes de règlementation et de gestion pour les AMP qui limitent les activités génératrices de bruit et préservent l’habitat acoustique des espèces marines en péril;
- l’élaboration de seuils de bruit quantitatifs et de cibles de réduction pour les habitats de toutes les espèces aquatiques en péril répertoriées qui ont besoin d’environnements sonores silencieux pour leur rétablissement;
- l’imposition de limites de réduction de bruit en fonction de la région pour les projets côtiers et en mer;
- l’obligation de prendre en compte le bruit dans les évaluations environnementales;
- la règlementation des seuils de bruit, l’imposition de zones à éviter et de mesures d’atténuation telles que la vitesse maximale des navires, les restrictions et les technologies silencieuses.
Ces recommandations ne sont qu’un des éléments d’une stratégie globale, qui est nécessaire pour s’attaquer véritablement aux impacts du bruit sous-marin. La Stratégie sur le bruit dans les océans, en cours d’élaboration, doit jeter les bases d’une politique robuste en matière de bruit sous-marin qui donne les moyens nécessaires pour règlementer, contrôler et faire respecter les limites de bruit et les cibles de réduction.
Hussein Alidina, spécialiste principal de la conservation marine au WWF-Canada, explique :
« Les niveaux de bruit dans nos océans étant toujours en augmentation, l’approche actuelle n’est pas suffisante pour protéger la vie marine, y compris les baleines. Les outils juridiques dont nous disposons actuellement, même s’ils étaient utilisés à leur plein potentiel, n’offrent qu’une solution temporaire. Ce dont nous avons besoin est une solution à long terme qui règlemente véritablement la pollution sonore sous-marine. »
Mike Kofahl, avocat-conseil chez East Coast Environmental Law, explique :
« Les lois canadiennes relatives à la conservation marine et aux industries océaniques n’ont pas été conçues pour tenir compte du bruit dans les océans – et il s’agit d’une omission grave qui doit être corrigée. Une stratégie nationale sur le bruit dans les océans, accompagnée de lois fournissant des solutions immédiates et à long terme, telles que des normes de bruit applicables, est nécessaire si nous voulons atténuer les effets de plus en plus néfastes de la pollution sonore sous-marine. »
Stephanie Hewson, avocate-conseil chez West Coast Environmental Law, explique :
« Nous connaissons suffisamment les impacts du bruit sur les espèces marines pour savoir qu’il est temps d’agir. Notre analyse montre que le Canada est en mesure de promulguer des lois pour un océan silencieux, qui comprennent des limites juridiquement contraignantes sur le bruit sous-marin, et des protections pour créer des sanctuaires acoustiques qui permettent à la vie marine de s’épanouir. L’océan et les animaux qui y vivent n’ont plus le temps d’attendre. »
Consultez l’analyse juridique :
- version française disponible sur demande, veuillez écrire à [email protected]
- version anglaise en ligne
À PROPOS
À propos du WWF-Canada
Le WWF-Canada s’engage à prendre des mesures de conservation justes et équitables qui permettent de restaurer la nature, de renverser la perte d’espèces et de lutter contre les dérèglements climatiques. Nous nous appuyons sur des analyses scientifiques et sur les recommandations des Autochtones pour nous assurer que tous nos efforts sont liés à un seul objectif : un avenir où les espèces, la nature et les humains vivent en harmonie. Pour en savoir plus, visitez le wwf.ca/fr.
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West Coast Environmental Law est un groupe à but non lucratif d’avocats et de stratèges qui se consacrent à la sauvegarde de l’environnement par le droit. West Coast travaille à transformer la prise de décision environnementale et à renforcer la protection juridique de l’environnement par des stratégies juridiques collaboratives qui font le pont entre le droit autochtone et le droit canadien.
À propos d’East Coast Environmental Law
East Coast Environmental Law est un organisme de bienfaisance d’intérêt public spécialisé dans le droit environnemental qui s’engage à partager ses compétences juridiques avec des personnes et des groupes en quête de justice environnementale et climatique pour toutes les espèces et les systèmes naturels soutenant ces espèces. Nous plaidons en faveur de lois et de politiques environnementales progressistes pour le Canada atlantique, nous fournissons une éducation juridique publique et nous partageons nos compétences juridiques pour soutenir les individus, les communautés et les organismes qui travaillent à prévenir ou éviter les dommages causés à l’environnement.
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