La restauration menée par les Autochtones réduit la menace des prochaines saisons d’incendies
Le centre intérieur de la Colombie-Britannique a toujours connu les feux de forêt, mais ce qui était autrefois un évènement relativement rare relié au renouvèlement de la nature est devenu plus fréquent et beaucoup plus intense. Les records de feux de forêt ont été pulvérisés durant la dernière décennie, avec les cinq pires saisons de feux de l’histoire depuis 2017, qui a été surpassée par l’année 2023, championne toutes catégories de la destruction avec 2,8 millions d’hectares dévorés par les flammes.
De toute évidence, ces forêts ne sont pas aussi résistantes au feu qu’elles l’ont déjà été.
Bien qu’il n’y ait pas qu’un seul élément responsable de l’aggravation des feux, la crise climatique a créé un effet d’entrainement de conséquences qui empirent les incendies. Les températures qui augmentent depuis deux décennies ont permis au dendroctone du pin ponderosa, un insecte, de survivre à l’hiver et de tuer des arbres debout, ce qui crée des zones peuplées de bois mort qui brule plus facilement.
Moins de neige accumulée entraine moins de fonte de neige, ce qui réduit le courant dans les ruisseaux et les rivières, en plus de diminuer l’humidité du sol et de la végétation, créant ainsi des conditions extrêmement sèches. Les dérèglements climatiques ont aussi affecté les cycles de pluie, plongeant l’intérieur de la province dans une sècheresse prolongée, un environnement parfait pour que les feux se développent.
Le colonialisme a aussi joué son rôle en interdisant les pratiques d’intendance des Premières Nations, comme le brulage dirigé ou culturel, une interdiction qui commence à peine à s’assouplir.
Utilisés délibérément durant des millénaires pour gérer les risques d’incendie, ces feux soigneusement contrôlés sont utilisés pour réduire le sous-bois qui agit comme combustible, ainsi que pour éliminer des maladies, ce qui crée des coupe-feux naturels et, à terme, améliore l’habitat.
À la place, les autorités ont utilisé, pendant des décennies, des techniques de lutte de moins en moins efficaces contre les incendies tout en additionnant les facteurs de stress issus des dérèglements climatiques et des pratiques industrielles comme le remplacement des feuillus plus résistants au feu (mais de moindre valeur économique) par des conifères.
En prenant tout cela en compte, comment pouvons-nous rétablir la forêt et combattre les incendies à long terme?
Une manière de procéder est de rétablir des écosystèmes plus équilibrés pour les humains et les espèces à travers la restauration menée par les Autochtones, un type de travail réalisé par la Secwepemcúl’ecw Restoration and Stewardship Society (SRSS).
Cette association a été formée par plusieurs communautés Secwépemcs après la saison des incendies de 2017 qui a brulé 192 725 hectares du territoire traditionnel Secwépemcúl’ecw durant 75 jours dramatiques. Pour ces communautés, la restauration ne consiste pas seulement à planter des arbres – il s’agit plutôt d’utiliser des pratiques traditionnelles pour restaurer un écosystème équilibré qui profite aux communautés et aux espèces, pas juste à l’industrie. Voyez comment elles procèdent.
Restaurer les arbustes autant que les arbres
Les efforts de reboisement se concentrent habituellement sur les arbres économiquement valorisés. Ne pas réintroduire d’autres types de plantes affaiblit la résistance de la forêt au feu. Avoir une bonne combinaison d’arbres et d’arbustes aide à capter et à créer des habitats plus humides, à hydrater les plantes et à réduire les conditions sèches, ce qui réduit le risque de déclencher un incendie, et en réduit l’intensité s’il se déclenche.
Planter une variété d’espèces
La majeure partie des terres dévastées par les incendies étaient des forêts en monoculture gérées pour en maximiser la valeur pour l’exploitation forestière. La SRSS travaille à créer une forêt mixte en plantant un mélange de conifères et de feuillus en plus d’arbustes et d’autres plantes indigènes. Les forêts mixtes aident aussi à capter l’humidité, à hydrater les plantes et à réduire les conditions de sècheresse, réduisant le risque d’incendie et l’intensité des incendies en activité.
Planter des espèces indigènes ou acclimatées
Mieux adaptées à l’écologie locale, les espèces indigènes ou acclimatées offrent nourriture et abri à des espèces importantes culturellement tout en fournissant aux communautés des Premières Nations un accès élargi à des plantes appartenant à l’alimentation et à la pharmacopée traditionnelles, comme la shépherdie du Canada, l’ail du Canada et le fraisier des champs.
L’objectif ultime de ce travail est de rétablir la forêt après un feu d’une façon conforme aux valeurs et aux lois Secwépemcs qui, comme l’exprime la SRSS, vient de leur connexion à tmicw, ce qui se traduit approximativement par toute la vie et les ressources trouvées sur les terres et les eaux Secwépemc. « C’est notre responsabilité culturelle de nous assurer de laisser un héritage de terres régénérées, de forêts et de biodiversité enrichies et prospères, d’espèces en santé et abondantes, d’air et d’eau propres pour les prochaines générations. »
Guidés par le savoir autochtone combiné aux données scientifiques, la SRSS et le WWF-Canada travaillent ensemble depuis 2020 pour restaurer les espèces culturellement importantes et en péril et leurs habitats. Cela comprend également la surveillance des progrès à long terme, comme la quantité de carbone que ces forêts emmagasinent au fil du temps.
Depuis, la SRSS a planté plus de 1,1 million d’arbres avec l’appui financier du WWF-Canda et de nos partenaires bailleurs de fonds, restaurant ainsi plus de 677 hectares d’écosystèmes forestiers affectés par les incendies. Les communautés membres de la SRSS ont été formées à surveiller la façon dont leurs efforts ont contribué à séquestrer le carbone. Elles travaillent actuellement à augmenter leur production en pépinière et à mettre en œuvre leur programme de collecte de semences indigènes. Leur objectif est d’augmenter le reboisement à un million d’arbres annuellement d’ici 2026.
Ce travail est soutenu par Aviva Canada, le gouvernement du Canada via le programme 2 milliards d’arbres, la Fondation Peter Gilgan et la Fondation Ronald S. Roadburg.