Des milliards de litres de rejets nocifs sont déversés chaque année par les navires dans les eaux protégées du Canada, révèle un rapport du WWF-Canada

Océan

Les constats démontrent le besoin urgent de promulguer et de faire respecter une interdiction de déversement dans les aires marines protégées  

TORONTO, 1er mars 2022 – En 2019, le gouvernement fédéral a annoncé des « normes minimales » pour les aires marines protégées (AMP) qui interdisent le déversement – mais il reste encore à définir ce qui est visé par l’interdiction. Aujourd’hui, un nouveau rapport du Fonds mondial pour la nature (WWF-Canada) démontre que les espèces en péril sont toujours menacées par les rejets nocifs des navires dans les aires protégées, en plus d’identifier ce qui doit être fait pour contrer cette menace grandissante.

La toute première Évaluation nationale des déversements issus des navires du WWF-Canada constate que les bateaux navigant en eaux canadiennes génèrent annuellement 147 milliards de litres de rejets découlant des activités de routine – soit l’équivalent de 59 000 piscines olympiques. Dix pour cent de ces rejets dangereux sont générés dans les AMP et d’autres mesures de conservation efficaces par zone (AMCEZ) ayant pour but de protéger les écosystèmes marins et les espèces en péril.

L’évaluation a aussi permis de constater que les eaux de lavage des épurateurs – qui sont 100 000 fois plus acides que l’eau de mer – comptent pour 97 % des rejets générés à l’échelle nationale, et qu’elles sont presque toutes rejetées directement dans l’océan, y compris dans les aires protégées. D’autres types de rejets nocifs – les eaux grises, les eaux de cale et les eaux usées – pourraient être entreposées pour en disposer de manière plus sécuritaire, mais il n’y a aucune façon de confirmer quelle quantité est réellement retenue et quelle quantité est déversée dans les AMP.

Les aires protégées situées près des ports principaux du pays et le long des routes des navires marchands et de passagers dans la voie navigable du Saint-Laurent et au large de la Colombie-Britannique et de la Nouvelle-Écosse sont les plus affectées par les déversements qui menacent les baleines, les oiseaux marins, les poissons, les coraux, les crustacés et les autres espèces.

Les types de rejets mesurés dans le rapport contiennent, lorsque combinés, des métaux lourds, des composés cancérigènes, des hydrocarbures, des microplastiques, des pathogènes, des nutriments, des produits chimiques toxiques et d’autres polluants qui contribuent à la création de zones mortes dans l’océan, aggravent l’acidification de l’eau de mer et réduisent la quantité de carbone absorbée par l’océan.

« L’ampleur des rejets déversés dans les AMP révélée par ce rapport démontre clairement l’urgence d’établir une interdiction détaillée des déversements, a affirmé Sigrid Kuehnemund, vice-présidente Espèces et industries du WWF-Canada. Les efforts de conservation marine du Canada ne devraient pas être mesurés seulement par la taille des aires que nous protégeons, mais par la rigueur des protections. Les règlementations en vigueur ne protègent simplement pas les espèces et les écosystèmes vulnérables de la pollution issue des navires. »

La recommandation principale du rapport demande que le Canada développe une définition détaillée du déversement qui interdise aux bateaux de déverser dans les AMP tous les rejets issus de leurs activités de routine.

Constats principaux de l’Évaluation nationale des déversements issus des navires : 

En utilisant les données de 2019 de l’Organisation maritime internationale (OMI) pour 5546 bateaux navigant en eaux canadiennes, le rapport identifie quatre des principaux types de rejets issus des activités de routine des navires, l’endroit où ces rejets sont probablement déversés, et par quelle classe de navires.

  • Au sein des aires protégées, les bateaux génèrent annuellement, et déversent potentiellement, jusqu’à 14,7 milliards de litres. Cela inclut 14,5 milliards de litres d’eaux de lavage des épurateurs, 233 millions de litres d’eaux grises, 34,6 millions de litres d’eaux usées et 5,2 millions de litres d’eaux de cale.
  • Les navires de croisière sont les plus grands producteurs de chacun des quatre types de rejets, malgré qu’ils ne forment qu’un maigre 2 % des navires analysés.
  • C’est dans la réserve nationale de faune en milieu marin des îles Scott, au large de la côte nord de l’île de Vancouver, qu’est créé et potentiellement déversée la plus grande quantité de rejets, davantage que dans toute autre aire protégée. Cette région est un habitat de reproduction et d’alimentation important pour des millions d’oiseaux marins, notamment la moitié des stariques de Cassin du monde et 90 % des macareux huppés, ainsi que des otaries de Steller, des rorquals bleus et d’autres espèces en péril.
  • Si l’Arctique voit moins de trafic maritime, la proportion de rejets générés dans les aires protégées est de 16 % comparés aux 8 % de la côte Est et aux 11 % de la côte Ouest. Ce taux ne fera qu’augmenter alors que la crise climatique rend la région plus accessible.

Note aux éditeur.rice.s :  

  • Le volume réel des rejets d’activités de routine générés est probablement plus grand que nos estimations. Cette étude n’a inclus que les bateaux possédant un numéro d’enregistrement de l’OMI, et certains navires, ceux de la marine militaire par exemple, ont été exclus de l’analyse. Près de 9000 navires apparaissant dans la base de données duSystème d’identification automatique (SIA) ne sont donc pas représentés. L’évaluation n’inclut pas les autres types de rejets, comme les déchets solides et les eaux de ballast.
  • Bien que les eaux usées déversées à moins de 12 miles nautiques du littoral doivent être traitées, les AMP et les AMCEZ s’étendent souvent bien au-delà de cette limite et les rapports suggèrent que les usines de traitement des eaux usées des navires échouent souvent à atteindre les exigences minimales sur les effluents.

Documentation supplémentaire


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