Des leçons à tirer de la première aire marine protégée de l’Atlantique canadien

Cette année, la toute première aire marine protégée de l’Atlantique canadien créée en vertu de la Loi sur les océans passe le cap de l’adolescence. Mais puisque la protection marine au Canada est encore très récente, l’AMP du Gully, qui a cette année 13 ans, est considérée comme une grand-mère respectable dans le domaine des efforts de protection marine au pays. Et elle représente un excellent exemple de ce qu’est et ce que doit être la conservation marine.

© Pêches et Océans Canada

Le Gully est un profond canyon sous-marin situé à environ 200 km au large de la Nouvelle-Écosse à l’est de l’île de Sable. C’est le plus grand canyon sous-marin dans la région de l’Atlantique Nord, d’une profondeur de 2,5 km, et qui fournit un habitat exceptionnel pour la biodiversité, dont plus de 30 espèces de corail, la plus grande diversité connue de coraux du Canada atlantique.

Éponge carnivore © Pêches et Océans Canada

Certains des coraux accrochés aux parois de ce canyon ont plus de mille ans. Les forts courants dans le Gully transportent les nutriments provenant des fonds marins, dont les millions de minuscules planctons se nourrissent, fournissant par la suite un copieux buffet pour les phoques, les oiseaux, les dauphins et les baleines.

Coraux des grands fonds dans le Gully © Pêches et Océans Canada

Le Gully abrite aussi une population menacée de baleines à bec communes. Contrairement aux autres populations de baleines à bec communes dans l’Atlantique Nord, cette petite sous-population, qui englobe seulement 140 individus, demeure dans le Gully et dans les canyons Shortland et Haldeman voisins pendant toute l’année. Les plus grandes menaces à leur survie sont les collisions avec les navires ou les enchevêtrements dans les engins de pêche. Parce qu’elles utilisent le son pour se déplacer et communiquer, elles sont aussi affectées par la pollution sous-marine provenant des navires, les sonars et la prospection sismique.

Baleine à bec communue © Hilary Moors Murphy

Afin de protéger les baleines à bec communes et les autres espèces, les activités qui augmentent le bruit sous-marin et le trafic maritime comme l’exploration pétrolière et gazière sont interdites dans l’AMP. Une grande partie de l’AMP est également interdite à la pêche, ce qui limite la possibilité d’enchevêtrement dans certaines zones.

Dauphins à flancs blancs dans le Gully © Pêches et Océans Canada

Le WWF-Canada avait milité pour de solides protections pour le Gully avant qu’il ne soit protégé en 2004, et notre implication se poursuit puisque nous siégeons sur le Comité consultatif du Gully, qui offre des conseils à Pêches et Océans Canada concernant la gestion de l’AMP. La première AMP du Canada atlantique a créé un solide précèdent pour les futures aires marines protégées dans la région et partout au pays – un modèle qui n’a malheureusement pas toujours été suivi.

© Pêches et Océans Canada

La protection du Gully a été une étape importante pour la gestion des océans dans le Canada atlantique, et c’est aujourd’hui le thème principal d’une exposition permanente au Musée d’histoire naturelle à Halifax, en Nouvelle-Écosse. Le Gully nous démontre qu’il est possible de créer des aires marines protégées ayant une réglementation suffisamment forte pour protéger la biodiversité exceptionnelle des milieux marins. Les AMP futures et proposées devraient suivre cet exemple.