Le besoin d’énergies renouvelables en Arctique

Par Farid Sharifi
Comment les communautés de l’Arctique réduisent leur empreinte environnementale et augmentent leurs opportunités économiques?
Le diesel est la première source de carburant utilisée par les communautés de l’Arctique. Malgré ses nombreux inconvénients, dont la pollution de l’air, les coûts ainsi que les risques de déversement associés à son transport dans le Nord, le diesel est fiable, ce qui est une caractéristique importante pour ces communautés.
Alors que le diesel est la norme, les énergies renouvelables commencent à devenir de plus en plus populaires. Lors de mon voyage en Arctique en septembre 2015, j’étais à la recherche de projets prometteurs concernant les énergies renouvelables. J’ai visité deux communautés de l’Arctique, une en Alaska et une au Canada, dans les Territoires du Nord-Ouest.
Kotzebue, Alaska
Kotzebue est une communauté éloignée, située en-dessous du cercle polaire arctique. Cette ville a été construite sur un territoire de toundra marqué par le pergélisol et autour d’un port fonctionnant seulement trois mois et demi par année, lorsqu’il n’est pas dans la glace. Malgré ces caractéristiques plutôt hostiles, l’Association électrique de Kotzebue érigea sa première éolienne en 1997.
Le jour où je débarquai à Kotzebue, le vent soufflait fortement et constamment le long des côtes de la mer de Chukchi. Nous avons roulé à six kilomètres de la ville et avons pu voir dix-neuf éoliennes mues par le vent sur un fond bleu ciel. Ce jour-là, ces éoliennes ont produit plus de 60% de l’électricité de la communauté, complété par une seule génératrice au diesel, qui supporte 3 200 résidents.

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Parc éolien à Kotzebue à 6 kilomètres de la ville, Alaska. © Farid Sharifi/WWF-Canada

Depuis que la première éolienne fut installée il y a presque deux décennies, le parc éolien de Kotzebue a bien grossi et de nouvelles technologies sont maintenant utilisées pour maximiser la production d’électricité, par exemple un système de stockage d’énergie avec une pile qui fournit à la ville le tiers de sa charge moyenne annuelle. Les jours où le vent génère plus d’électricité que ce dont la ville a besoin, un convertisseur transforme l’énergie en trop en chaleur pour la chaudière thermique de l’hôpital.
Aujourd’hui, le parc éolien produit jusqu’à 3 mégawatts et remplace à lui seul environ 250 000 gallons de diesel chaque année. En plus de participer à l’amélioration de la qualité de l’air et à la réduction des risques environnementaux liés aux déversements, la communauté a pu économiser près d’un million de dollars en coûts liés au carburant.

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Stockage de diesel à Kotzebue, Alaska. © Farid Sharifi/WWF-Canada

Nome, Alaska
À Nome, une ville de 4 000 habitants à 200 miles au sud-ouest de Kotzebue, le vent fournit 7% de la consommation annuelle en électricité et permet de sauver 150 000 gallons de diesel, ce qui représente près d’un demi-million de dollars chaque année.

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Parc éolien à Nome, Alaska. © Farid Sharifi/WWF-Canada

L’énergie éolienne n’est pas la seule énergie renouvelable que l’on retrouve à Nome. L’édifice de la Bering Straits Native Corporation est couvert de panneaux solaires photovoltaïques de 16,8 KW qui compensent l’équivalent de 1 000 gallons de diesel par année.
À Nome, j’ai aussi compris que réduire la consommation de diesel apportait aussi un autre énorme avantage aux communautés nordiques. En 2012, la mer de Béring s’est recouverte de glace avant la livraison prévue de diesel, laissant les communautés avec la peur de ne pas avoir assez de carburant pour s’alimenter en électricité pour l’hiver à venir. Un pétrolier russe de 300 pieds de long fût engagé pour livrer le diesel et le gaz, devant suivre le brise-glace polaire Healy de la Garde côtière des États-Unis. Cette opération très coûteuse aura duré une semaine et aurait pu causer de lourdes pertes environnementales à la région. Voyez la vidéo ici : https://www.youtube.com/watch?v=gGyesbId3yg

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L’édifice de la Bering Straits Native Corporation à Nome, Alaska. © Farid Sharifi/WWF-Canada

Yellowknife, Territoires-du-Nord-Ouest
L’énergie solaire a elle aussi un énorme potentiel de réduction de la consommation de diesel dans le Nord, grâce aux longues journées estivales arctiques. Le potentiel énergétique solaire est à son paroxysme en mars et avril, lorsque les journées sont longues et que la neige permet la réflexion des rayons qui ajoute au potentiel. Les projets en lien avec cette source d’énergie propre dans les Territoires du Nord-Ouest ont été particulièrement réussis grâce à la mise sur pied d’une politique de facturation nette (article en anglais). La ville de Yellowknife compte ainsi plusieurs édifices fonctionnant à l’énergie solaire.
Des murs solaires ne nécessitant que très peu d’entretien sont aussi en fonction à Yellowknife. Les murs installés à l’école catholique Weledeh Catholic sont opérationnels depuis 1998 et chauffent la bâtisse confortablement, ce qui en fait un excellent exemple d’efficacité énergétique.

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Édifice gouvernemental Greenstone, Yellowknife, TNW. © Farid Sharifi/WWF-Canada

 

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Mur solaire à l’école catholique Weledehl, Yellowknife, TNW. © Farid Sharifi/WWF-Canada

Les technologies vertes liées aux énergies renouvelables sont réellement en train de faire une percée en Arctique, aidées par l’abondance de ressources naturelles pouvant être exploitées et par le besoin de trouver une alternative au diesel. Au cours des cinq prochaines années, le Fonds mondial pour la nature (WWF-Canada) travaillera à démontrer que les énergies renouvelables telles que le vent, le soleil et l’énergie hydraulique peuvent contribuer à la durabilité ainsi qu’à un environnement plus propre pour les communautés canadiennes de l’Arctique.