Le béluga aime aussi l’eau douce!

Le béluga est une espèce essentiellement marine, et dans le Grand Nord, son territoire se limite aux zones d’eau salée. Mais saviez-vous qu’une population de bélugas habite l’estuaire du fleuve Saint-Laurent, dans une zone où l’eau douce des Grands Lacs vient se mélanger à l’eau salée de l’océan Atlantique? Cette population est géographiquement isolée des autres populations de bélugas, et elle est en péril – de fait, le COSEPAC a récemment classé l’espèce « en voie de disparition ». On estime qu’il ne reste qu’environ 900 individus, soit moins de 20 % de la population du début du 20siècle.

Béluga (Delphinapterus leucas), Fleuve Saint-Laurent, Québec, Canada. © Robert Michaud / WWF-Canada
Béluga (Delphinapterus leucas), Fleuve Saint-Laurent, Québec, Canada. © Robert Michaud / WWF-Canada

L’équipe du programme Eau douce du WWF-Canada s’intéresse à la santé des écosystèmes d’eau douce au Canada ainsi qu’aux menaces qui pèsent sur eux. Les travaux réalisés dans le cadre de divers projets permettent de colliger de nouvelles données sur l’état des habitats, et de découvrir pourquoi les espèces aquatiques à travers le monde connaissent un inquiétant déclin. Pourquoi donc, quand on s’intéresse à l’eau douce, se préoccuper des bélugas?
On sait bien qu’il est important que les tortues, les poissons et autres espèces des cours d’eau et des lacs vivent dans un milieu en santé. Or il en va de même des bélugas de l’estuaire du Saint-Laurent, comme de toutes les espèces aquatiques. Ces bélugas vivent dans la zone du fleuve où l’eau douce des Grands Lacs vient se jeter dans l’eau salée de l’Atlantique. Au moment de la débâcle, vers la fin mars, lorsque les glaces se brisent dans l’estuaire et le golfe du Saint-Laurent, les bélugas commencent à se rassembler à l’embouchure de la rivière Saguenay, dans une déclivité où l’eau douce et l’eau salée s’entremêlent. Les bélugas profitent ici de l’eau moins profonde et plus tempérée pour y donner naissance et élever leurs petits, et ils aiment aller se frotter sur le lit graveleux de l’estuaire pour accélérer leur mue. On a vu les bélugas de cette région parcourir jusqu’à 100 km le long de la rivière Saguenay – jusqu’à Saint-Fulgence —, et les communautés de la région comprennent bien l’importance de l’eau douce.

Quatre bélugas (Delphinapterus leucas) nageant en surface dans le fleuve Saint-Laurent, au Québec. © Robert Michaud / WWF-Canada
Quatre bélugas (Delphinapterus leucas) nageant en surface dans le fleuve Saint-Laurent, au Québec. © Robert Michaud / WWF-Canada

On sait depuis de nombreuses années que les bélugas de l’estuaire sont empoisonnés par les contaminants contenus dans l’eau, produits issus de l’activité industrielle, particulièrement dans les environs des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent. Ces toxines anthropogéniques (issues de l’activité humaine) s’accumulent dans les tissus graisseux de nombreuses espèces aquatiques et, comme elles sont bioaccumulables, elles se retrouvent ensuite dans la chaîne alimentaire. Lorsqu’elles arrivent dans le ventre des bélugas, ces toxines – BPC, dioxines et EDP – sont en concentrations extrêmement fortes. De fait, les accumulations de toxines par les bélugas sont telles que certaines carcasses de bélugas ont dû être classées comme « déchets toxiques », et être éliminées par les autorités locales suivant la réglementation sur les matières dangereuses. La réduction des produits toxiques dans l’habitat, les sources de nourriture et les bélugas eux-mêmes est l’un des objectifs prioritaires du programme de rétablissement visant la population « menacée » du Saint-Laurent.
Le WWF-Canada poursuit actuellement un vaste programme sur la santé de l’eau douce et les menaces pesant sur l’ensemble du bassin versant des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent, et publiera les résultats de ces travaux vers la fin du mois de juin. Les analyses réalisées nous fourniront bien des données nécessaires pour mieux comprendre la situation des bélugas du Saint-Laurent.
Nombre d’espèces d’eau douce à travers le monde sont menacées aussi. Pour en apprendre davantage sur les cétacés vivant en eau douce – dauphins, marsouins et baleines – cliquez ici (site international du WWF, en anglais).
Notre travail de conservation du béluga dépend de votre soutien. Faites un don maintenant ou commandez une trousse d’adoption symbolique pour nous aider à les protéger.