Les mamans ours polaires aiment le printemps aussi!

Pour la plupart d’entre nous, le printemps évoque les fleurs et le chant des oiseaux. Pour Daryll Hedman, directeur régional de la faune pour le gouvernement du Manitoba, le printemps c’est observer les ourses polaires sortir de leur tanière accompagnées d’un ou deux oursons tout neufs!

Ourse polaire observée par Daryll Hedman au cours du survol par hélicoptère d’une aire de mise bas dans le nord-est du Manitoba. © Gouvernement du Manitoba
Ourse polaire observée par Daryll Hedman au cours du survol par hélicoptère d’une aire de mise bas dans le nord-est du Manitoba. © Gouvernement du Manitoba

Daryll Hedman est également responsable d’un programme parrainé par le WWF-Canada et qui consiste à faire un relevé des aires de mise bas des ours polaires dans le nord du Manitoba, au sud-est du parc national Wapusk. Tous les mois de février et mars, Daryll s’envole en hélicoptère à la recherche de tanières servant d’abri aux ourses gestantes et allaitantes durant le rude hiver du Nord manitobain. Cet hiver, pas moins de 30 ourses se sont creusé une tanière dans l’aire de mise bas sous surveillance, qui s’étend de la rivière Nelson à la frontière de l’Ontario.
Il est important de savoir combien d’ours habitent la région, dit Daryll Hedman, surtout que la population d’ours de la zone ouest de la baie d’Hudson – environ 1 030 individus – est l’une des plus populations vivant le plus au sud dans le monde, et elle est assez stable en ce moment.
« Ces populations sont intéressantes à étudier car leur habitat est différent de celui des ours de la région de Beaufort, explique-t-il. Les ours vivant plus au nord creusent leur tanière directement dans la neige, mais ici, dans le sud, les ourses creuseront volontiers leur tanière dans des plateaux palsiques, soit des zones de tourbière. »
Daryll Hedman travaille avec une équipe réunissant des membres des conseils de gestion des ressources auprès des Premières Nations Cris de Fox Lake et York Factory. Dès le mois de février lorsque les ourses font leur première sortie, l’équipe s’envole et longe les côtes à la recherche de traces menant vers la banquise où les ours sont partis à la recherche de nourriture.
« Dès que nous voyons des traces, nous faisons demi-tour pour remonter jusqu’aux tanières. Nous sommes toujours étonnés de constater à quelle distance dans les terres les ourses s’enfoncent pour aller mettre bas. On a trouvé des tanières à 70 km de la côte. Pour une ourse de 300 kilos, cela représente un effort considérable », précise Daryll.

Vicki Trim, l’assistante de Daryll Hedman, revenant de son inspection d’une tanière abandonnée. Ce n’est vraiment pas grand pour une maman ours de 300 kg et un ou deux oursons! © Gouvernement du Manitoba
Vicki Trim, l’assistante de Daryll Hedman, revenant de son inspection d’une tanière abandonnée. Ce n’est vraiment pas grand pour une maman ours de 300 kg et un ou deux oursons! © Gouvernement du Manitoba

Pourquoi s’aventurer si loin de la côte? Probablement pour protéger les oursons, qui sont très vulnérables, des loups affamés. Daryll Hedman affirme avoir vu au cours de son survol ce printemps dernier des traces d’au moins un ourson qui n’a pas survécu. « Nous avons trouvé une zone où il y avait des preuves évidentes d’une bataille. On a suivi la piste d’une ourse accompagnée d’un ourson, puis la piste de l’ourson a disparu et la mère a poursuivi son chemin. C’est triste, mais ce sont des choses qui arrivent. »
Dès la mi-mars, c’est le grand voyage annuel qui se met en branle, et les ourses quittent la tanière avec leurs petits pour entreprendre le voyage en direction de la banquise dans la baie d’Hudson. Une fois que les petites familles ont quitté l’aire de mise bas, Hedman et son équipe se lancent dans l’exploration des tanières et des environs, sans crainte de déranger les occupants une fois qu’ils sont partis. Ils découvrent toujours quelque chose d’étonnant.
« Les tanières sont vraiment petites, dit-il. Bien plus petites qu’on pourrait penser, et on se rend compte que l’ourse elle-même trouve parfois son espace trop restreint, car on remarque souvent qu’elle a creusé une alvéole ou une espèce de plateforme où elle installe les oursons pour avoir un peu de place pour elle-même. Il faut bien qu’elle puisse s’étirer un peu, non? » dit-il en souriant.
À la fin de l’hiver, on voit souvent les ourses sortir de la tanière pour faire un peu d’exploration dans les alentours, histoire de se dégourdir et de donner aux oursons l’occasion de courir et de jouer.
Les petites familles sortent faire de courtes promenades lorsque le temps est favorable. La mère creuse une tanière provisoire – habituellement il s’agit d’un simple trou d’environ 30 cm sur 30cm – dans lequel se nichent les oursons, et la mère s’installe par-dessus pour les tenir au chaud et les protéger. « C’est toujours agréable de voir l’activité reprendre au printemps, après un hiver où le mercure n’hésite pas à chuter dans les -50 degrés Celsius avec le facteur vent. Il m’est arrivé de faire des visites de la région au mois de janvier, et de revenir à la maison et dire à ma conjointe que je n’avais pas pu trouver la moindre trace d’activité. Évidemment! me répondait-elle d’un air découragé, tu connais bien des mères qui sortiraient leur bébé dehors à -50?! Évidemment! »